Chapitre II
Toute analyse de discours ne saurait
faire l'économie d'un chapitre exposant la méthode
mise en oeuvre. Cette exigence s'impose d'autant plus ici que
nous adoptons ce "parti pris" méthodologique
de nous attacher à la dynamique interne du discours et
à l'analyse de la spécificité de son travail
dans la production de la société. Voilà,
rappelons-le, la particularité de notre approche du duplessisme.
Mais ce premier objectif se double d'un second qui nous incite
à approfondir les possibilités que donne en elle-même
l'analyse du discours. Le discours, bien qu'il ne représente
qu'une facette de la réalité sociale, ne doit pas
être réduit à un simple reflet des autres
pratiques sociales. Comme nous l'avons souligné au premier
chapitre, le discours contribue à produire la société.
Sur cette base, il est donc nécessaire de réfléchir
en profondeur non seulement sur les techniques permettant de rendre
compte du discours, mais sur l'articulation méthodologique
de ces techniques à des exigences théoriques portant
sur la nature de son efficacité et, en particulier, sur
celle du discours politique dans le procès d'institutionnalisation
ou de politisation de la société bourgeoise. 1. Des choix méthodologiques
Il est possible de ramener à
trois ordres de problèmes les choix fondamentaux que nous
avons effectués. Ces choix, il va sans dire, sont guidés
aussi bien par notre objectif général d'étendre
notre connaissance du duplessisme au moyen d'une analyse systématique
des discours politiques que par notre problématique du
discours politique. A un niveau très général,
il nous faut nous interroger sur le problème épistémologique
du rapport à l'empirie. Nous avons adopté à
cet égard une approche empirique/constructiviste qui fera
l'objet des développements de la prochaine section. La
seconde question, traitée dans la partie suivante, concerne
nos rapports aux traditions méthodologiques de l'analyse
de contenu et de l'analyse de discours. Nous devons choisir soit
de nous installer dans un espace prédéfini par l'une
de ces traditions, soit de redéfinir un espace particulier
se situant aux frontières de l'une et de l'autre. Notre
troisième problème concerne la pertinence du recours
à l'assistance de l'informatique dans l'élaboration
de notre méthodologie. Nous commenterons, ebn effet, la
nature de cette utilisation dans nos procédures et situerons
l'importance qu'a pu prendre l'informatique dans notre démarche
(troisième section).
1.1 Le choix d'une approche empirique/constructiviste
Jean-CLaude Gardin (). Avant d'aborder
les conséquences de ce choix sur la constitution de notre
corpus et sur la conception de la grille sociologique appliquée
aux textes, nous présenterons les traits principaux qui
caractérisent une telle approche.
La première caractéristique
d'une telle perspective est de favoriser aussi bien la "descendance"
que l'"ascendance". Une approche descendante rigoureuse
nécessiterait une théorie "forte" du discours,
capable de formaliser des hypothèses a priori et sur le
contenu et sur le fonctionnement discursifs. Dans la mesure où
cela était imaginable, une telle perspective ne pourrait
s'appliquer qu'à des sous-ensembles empiriques limités
et à des corpus fortement homogènes. Mais, ce qui
n'est pas encore permis à la linguistique, dont l'objet
a été judicieusement délimité, saurait
difficilement s'avérer possible dans le domaine de l'analyse
du discours. En d'autres mots, il n'existe pas de telles théories
capables de structurer à l'avance un champ expérimental.
Une stratégie descendante demeurerait donc essentiellement
partielle et peu productive au chapitre de la découverte.
Une approche ascendante pure renoncerait, au contraire, àtoute
pré-construction explicite. Nous proposons plutôt
de définir des domaines larges d'investigation à
l'aide de notre problématique du discours politique et
de nos hypothèses sur son travail dans la société
duplessiste tout en adoptant une attitude ouverte au texte. Nous
ne nous contenterons pas seulement de vérifier des hypothèses
définies a priori, mais nous tenterons de développer
celles-ci au fur et à mesure du dévoilement de nouvelles
données. Notre méthodologie doit donc permettre
un mouvement d'aller-retour entre les hypothèses et les
explorations textuelles. Le second trait, qui s'articule au premier, renvoie à un présupposé non-déterministe. En linguistique computationnelle () parle à ce propos d'intertextualité. Le discours répond toujours à d'autres discours. Nous ajouterions que le discours politique est essentiellement plurivocal. Il n'aboutit à produire des effets qu'au terme d'un long travail dialogique. Discours ouvert, il est susceptible d'accueillir toute nouvelle question et de se manifester dans une multitude de lieux. Discours parcellisé, il ne vise pas toujours à dégager une cohérence globale, mais s'attarde à des questions particulières. Discours segmenté, il surgit de divers appareils "politiques" ou "non-politiques" et met à contribution autant de locuteurs différents.
Ces remarques étant faites,
nous nous attarderons à montrer en quoi ces divers choix
théoriques et méthodologiques ont pu influencer
la constitution de notre corpus.Il serait trivial de rappeler
que les corpus ne se donnent jamais d'eux-mêmes et que,
faute d'en arrêter les principes de construction, ils seront
constitués sur la base d'un arbitraire quelconque. En
ce qui nous concerne, trois éléments ont contribué
à fixer les principes de construction de l'ensemble de
notre corpus: notre théorie du discours politique, notre
hypothèse socio-historique principale portant sur la production
d'un bloc social particulier et, enfin, les caractéristiques
de notre méthodologie.
Voyons d'abord comment notre théorie
du discours détermine quelques principes généraux
délimitant l'espace de constitution du corpus. Ces limites
excluent d'abord les discours théoriques, philosophiques
ou doctrinaires. Elles renvoient avant tout à la discussion
démocratique, telle qu'elle se manifeste dans des discours
de masse. Ces discours adressés à une multiplicité
de destinataires sont aussi le produit d'une diversité
d'énonciateurs. Nous avons donc choisi d'élargir
notre corpus bien au delà de ce qui est communément
considéré comme des discours politiques. Selon
leurs diverses origines, ces discours prennent diverses formes,
mais ils interviennent invariablement sur la scène publique
et influencent le procès de production et de transformation
de la société. Ces discours, par définition
polémiques, sont aussi multiples autant du point de vue
de leur visée (le plus souvent partielle) que du point
de vue de leur source. Il importait donc de retenir les discours
émanant d'appareils différents, appareils placés
sous l'hégémonie de certains groupes, fractions
ou classes sociales. Intervenant de façon significative
dans le procès de représentation de la société,
ces discours doivent également produire une unité
relative de la représentation de l'espace, de la communauté
et des rapports sociaux. Nous avons alors choisi de retenir les
discours contribuant à produire cette unité en configurant
les alliances de classes, mais aussi les contre-discours proposant
éventuellement une alternative à la constitution
du bloc social. La construction empirique de notre corpus tient compte de ces principes généraux, mais se rapporte de manière plus spécifique à nos hypothèses théoriques sur le sens à donner au régime duplessiste. Ainsi l'identification des appareils, des classes et des catégories sociales d'où émergent ces discours relève avant tout de notre analyse socio-historique de la période. L'ensemble de ces principes de construction a donné empiriquement un corpus global comprenant deux grands ensembles. Le premier se rapporte directement aux institutions politiques. Il s'agit des discours du budget et du trône, des discours législatifs, électoraux et constitutionnels. Le second, "parapolitique" comprend un ensemble de discours émanant de la société civile. Nous avons retenu les discours émanant des institutions religieuses (soit les mandements des évêques et les journaux d'action catholique), ainsi que les discours des organisations patronales, ouvrières et agricoles.
Nous nous sommes ainsi donnés
les moyens, dans le premier ensemble, de saisir la dynamique interne
des diverses formes du discours émanant des institutions
politiques. En effet, nous pouvons directement rendre compte
de leur caractère polémique, puisque nous disposons
des interventions des différents partis politiques, ou
encore des divers paliers de gouvernement. Par ailleurs, le recours
au discours "para-politique" nous permet d'élargir
notre saisie de le discursivité politique à l'ensemble
des forces sociales qui contribuent, par leur alliance ou leur
opposition, à la constitution d'un bloc social dépassant
largement l'espace exigu de la représentation politique
institutionnellement sanctionnée. Dans sa globalité,le corpus permet ainsi de rendre compte des grandes hypothèses issues de notre problématique, tout en correspondant dans sa particularité aux principales caractéristiques du discours politique. Mais il est évident que sans la présence d'une méthodologie ouverte, supportée par les possibilités offertes par l'informatique, la constitution d'un tel corpus n'aurait pas été pertinente. L'ampleur (près de 5,000 pages) du corpus aurait découragé toute entreprise de description et d'exploration systématiques et exhaustives des textes. Le caractère partiel ou spécialisé des divers discours et l'absence de morceaux choisis pour leur densité sémantico-idéologique, risquaient de la même façon d'invalider l'analyse thématique traditionnelle, précisément fondée sur la recherche de segments textuels denses. Notre méthodologie, si elle n'est pas au fondement de la constitution de notre corpus, autorise tout au moins les principes de sa construction. C'est ainsi que tant l'approche globale qui caractérise cette méthodologie que les caractéristiques des techniques qui en découlent ont orienté le choix des principes guidant la construction du corpus. Le premier élément de cette approche favorise, comme il se doit, la prise en compte systématique des données empiriques dans l'administration de la preuve et le processus de la découverte. Ce préjugé favorable à l'empirie nécessite un mouvement d'aller-retour entre les hypothèses générales et les données. L'existence de programmes informatiques capables de décrire systématiquement des données textuelles, puis d'explorer ces descriptions, permettait d'espérer l'identification de régularités textuelles sujettes àinterprétation. Le second élément de notre approche se caractérise par le non-déterminisme et se traduit techniquement par la grande souplesse d'un système capable d'explorer les divers états de description des corpus et d'effectuer des aller-retour sur des données susceptibles d'être déconstruites et reconstruites sur la base de principes variables. De manière générale, c'est cet aspect constructiviste de la méthode qui permet de tirer parti d'un aussi vaste corpus construit sur la base d'une faible prédétermination en termes de contenu.
En résumé, l'élaboration
des règles de constitution du corpus répond aux
nécessités de notre recherche: nous faisons un certain
nombre d'hypothèses sur la constitution d'un bloc social
spécifique au Québec dans le contexte de la transition
vers le capitalisme avancé; dans cette perspective, nous
nous intéressons au travail particulier du discours politique
dans ce processus, travail que ne nous pouvons appréhender
qu'à la condition d'étudier les discours d'appareils
qui s'articulent à la discussion publique; méthodologiquement,
nous devons nous donner les moyens d'interroger ces discours dans
leur spécificité interne et sur la base de leur
mise en rapport.
1.1.3.Incidence de la méthode
sur la construction d'une grille de catégories
Puisque nous revenons plus loin sur
la présentation complète de la grille de catégories
sociologiques qui a été projetée sur les
textes, il ne sera question ici que du principe général
de sa construction et du rapport qu'elle entretient avec notre
méthodologie. On peut poser dès le départ
la question du statut théorique d'une grille de catégories.
Il serait éminemment souhaitable que l'on disposât
d'une sémantique générale du discours politique.
Nous aurions alors une clé pour la contruction d'une grille
de catégories sociologiques permettant de lire adéquatement
les textes politiques. L'etat de la recherche dans le domaine
des sémantiques universelles (par exemple, la logique des
prédicats ou encore la dépendance conceptuelle)
montre toute la difficulté d'identifier des réseaux
structurés de signification pouvant répondre à
des règles de formation définies une fois pour toutes.
Par voie de conséquence, il est encore moins prévisible,
dans le domaine plus large des idéologies, que l'on puisse
arriver à construire une telle sémantique. Nous
ne pourrions prétendre dans les circonstances élaborer
une grille parfaitement cohérente théoriquement
et apte à épuiser le contenu du discours politique.
Notre démarche a été, dans un premier temps,
empirique sans pour autant ignorer les hypothèses que nous
formulions à propos du duplessisme. Nous voulions, en
effet, éviter de projeter sur les discours un filet dont
les mailles étaient par trop définies àl'avance.
Avant tout, nous désirions circonscrire la diversité
du discours en tentant de rapporter des groupes de formes lexicales
à des domaines sémantiques larges. Il s'agissait
en somme de permettre l'exploration, de manière regroupée,
des ensembles de vocables pouvant se rapporter à un même
principe de classement. Nous pouvions ainsi regrouper dans une
même exploration, divers mots renvoyant à des réalités
se rapportant à une domaine large comme ceux, par exemple,
de l'agriculture, des partis, ou encore de la communauté.
Par ailleurs, les caractéristiques de notre méthode
autorisent des retours en arrière de telle sorte que les
catégories attribuées à des mots puissent
être ignorées et les mots explorés pour eux-mêmes.
En somme, notre grille ne visait pas
à réduire le champ des interrogations du texte,
mais permettait des descriptions et des explorations de domaines
sémantiques plus larges que le mot. Elle fut donc construite
en prenant en considération à la fois le contenu
même des discours analysés et les principaux éléments
de ce que nous pouvons définir comme les domaines de réalisation
du discours politique, axés sur la production/transformation
de la société. Empiriquement, nous avons élaboré
une grille qui retenait les principales catégories économiques,
politiques, institutionnelles, sociales et relevant des valeurs,
telles que nous avons pu les repérer dans des lectures
préliminaires du corpus. Ce travail a d'ailleurs été
complété par l'application systématique de
cette grille à des corpus témoins. Théoriquement,
nous avons tenu compte des principales hypothèses concernant
le duplessisme afin de nous assurer de leur validation éventuelle.
La grille sociologique a ainsi connu plusieurs versions successives,
dénotant ce travail de va et vient entre les exigences
théoriques de notre recherche et la nécessité
de retraduire le texte dans un système de catégories
le plus exhaustif possible.
Cette approche réalisait nos
principes généraux de mixité ascendance-descendance
et de non-déterminisme. Les catégories permettent
de valider ou d'invalider nos hypothèses (approche descendante),
mais assurent également la révélation du
texte dans la perspective la plus ouverte possible (approche ascendante).
Nous pensons pouvoir ainsi, par l'application de modèles
d'exploration définis à partir de catégories
générales, faire surgir des régularités
que nous n'avions pas nécessairement anticipées.
Autrement dit, cette redéfinition progressive de notre
système de catégories nous a permis de faire place
à la découverte de ce qui n'avait pas été
projeté àl'avance sur les textes. D'un point de
vue non-déterministe, il faut rappeler que les catégories
sont associées aux mots, mais ne s'y substituent pas.
Il est donc possible à tout moment de retrouver les mots
eux-mêmes et éventuellement de les regrouper selon
d'autres principes. La grille ne prédétermine donc
pas de façon définitive le sens donné à
des mots. On explore les textes à partir des catégories
ou des mots. Certains mots peuvent d'ailleurs être catégorisés
de manière différente selon le contexte de leur
énonciation. L'exploration d'une catégorie réfère
à certaines occurences seulement d'un même mot. Par
ailleurs, on peut commander l'exploration de toutes les occurences
d'un même mot indépendamment ou dépendamment
d'une catégorie donnée. Le système laisse
donc toute la souplesse au niveau de la lecture du texte. 1.2 Le choix d'une méthode d'analyse du discours.
Il faut réfléchir maintenant
à la question plus restreinte du choix d'une méthode
d'analyse du discours. Au départ de cette recherche, nous
avons dû nous positionner par rapport à l'ensemble
des méthodologies aptes à rendre compte du contenu,
sinon du fonctionnement des discours. Nous devions le faire en
tenant compte du choix premier d'une approche constructiviste,
de l'existence d'un vaste corpus constitué de plusieurs
sous-ensembles textuels et, enfin, de la nécessité
de conduire de manière systématique des analyses
comparatives de nos sous-corpus. On ne peut référer indifféremment à la notion de contenu ou àcelle de discours sans soulever le problème de l'existence de deux traditions d'analyse des textes assez éloignées l'une de l'autre. La première est avant tout intéressée à identifier le contenu de la communication, afin d'en inférer des conclusions soit sur les conditions de l'énonciation, soit sur les conditions de la réception. Cette conception présuppose que le sens est donné dans le contenu et qu'il est interprétable directement en aval ou en amont de la communication. La seconde tradition, davantage marquée par les travaux de la linguistique, se préoccupe de la production du sens dans le discours. Pour cette dernière, il n'y pas de contenu indépendamment du fonctionnement de la langue. On cherche donc à repérer les modalités de ce fonctionnement. Dans les faits, ces deux traditions se sont développées dans des contextes institutionnels et disciplinaires fort différents et se sont présentées comme étant irréconciliables. La première tradition plaide pour l'efficacité de son approche à produire de l'information sur le contenu de la communication quelqu'en soit la forme. La seconde, blâmant la naïveté théorique de la première, met plutôt de l'avant la nécessité de saisir, sur des ensembles restreints, les mécanismes de la production du sens. Sans négliger, pour notre part, la différence fondamentale de ces points de vue, nous avons toujours cru que les deux ordres de questionnnement étaient légitimes et qu'il fallait en conséquence les tenir l'un et l'autre pour essentiels.
C'est donc à l'examen de ces
diverses méthodologies et à l'occasion de leur critique
attentive que nous avons développé les éléments
constitutifs de notre propre approche. De la tradition de l'analyse
de contenu, nous avons retenu l'idée que le repérage
systématique d'unités sémantiques s'imposait
comme moyen de révéler les éléments
constitutifs du travail idéologique. A la limite, cette
idée est à la base de toute lecture du texte. Il
s'agit toujours d'y effectuer une récolte d'éléments
formant des sous-ensembles que le lecteur juge significatifs
à partir du point de vue qu'il a adopté. La critique
littéraire, l'exégèse religieuse ou le commentaire
de texte relèvent tous de cette procédure. Mais
l'analyse de contenu a ceci de spécifique par rapport à
ces approches qu'elle a rendu explicite ses procédures
d'identification et de rétention de l'information contenue
dans les textes. Ces procédures peuvent cependant varier
considérablement d'une méthode à l'autre.
Ainsi, les méthodes quantitatives et les méthodes
qualitatives se différencieront en fonction de la plus
ou moins grande rigueur de leurs procédures et de la taille
des unités faisant l'objet de l'analyse. Nous reviendrons
plus loin sur la question, mais soulignons pour l'instant que
nous avons emprunté à l'analyse de contenu la préoccupation
de repérer de la manière la plus efficace et la
plus rigoureuse possible le contenu des textes analysés.
De la tradition de l'analyse du discours, nous avons retenu des préoccupations plus théoriques: soit la nécessité de penser le statut du discours, les modalités de construction des corpus et le problème de la production du sens à partir du travail même du discours. Ces interrogations étendent en quelque sorte les frontières du travail théorique nécessaire à la compréhension du rôle de l'idéologie dans la production de la société. Elles ne sauraient en conséquence être résolues aisément. Elles ajoutent ainsi aux visées pragmatiques de l'analyse de contenu une dimension théorique qui fait défaut à la première tradition. Le premier ordre de réflexion porte sur le statut du discours. Contrairement à l'analyse de contenu qui présuppose soit que le sens est dans un rapport bi-univoque avec le mot, soit qu'il se trouve dans un au-delà du discours, l'analyse du discours pose comme hypothèse générale que le sens est la conséquence d'un travail discursif. Il faut donc rechercher dans le discours lui-même, appréhendé comme processus complexe, l'origine du sens. Le deuxième ordre de questionnement concerne la construction des corpus. Si le discours est un processus dynamique, il ne peut se donner à lire indépendamment d'une reconstitution des éléments pertinents du procès qui le met en oeuvre. Les discours ne sont jamais là indépendamment d'un choix qui doit être réfléchi. La délimitation du corpus doit donc être défini àpartir du statut des différents discours dans le processus social qui fait l'objet de l'observation |